Kelly a commencé à porter des lentilles de contact à l’âge de 13 ans et les a portées presque tous les jours depuis environ 10 ans. Au cours de sa dernière année d’université, elle a remarqué que ses yeux devenaient de plus en plus irrités durant la journée. Après de nombreuses pauses dans le port de ses lentilles et des visites chez l’ophtalmologiste, elle aurait été autorisée à porter à nouveau ses lentilles de contact, mais l’irritation, la vision trouble et la sensibilité à la lumière sont revenues. Ses symptômes ont évolué rapidement et en quelques mois, on lui a dit qu’elle aurait besoin de greffes de tissus cornéens aux deux yeux.
N’ayant jamais eu de problèmes des yeux auparavant, Kelly était sous le choc et réfléchissait à la fragilité de nos corps : « Cela vous fait vraiment réaliser à quel point la vie est fragile. N’importe qui peut être frappé d’incapacité à la suite d’une perte de la vision, d’une perte de la mobilité… cela peut arriver à n’importe qui. » Même si on n’était pas certain de ce qui s’est passé, un spécialiste a soupçonné que Kelly avait eu une réaction allergique à un conservateur utilisé dans la solution pour lentilles de contact auparavant. Les cellules souches de ses yeux étaient irrémédiablement endommagées et ne pouvaient pas produire de cellules claires de la cornée, qui se régénèrent constamment dans un œil en bonne santé.
Kelly a été sur la liste d’attente pour une greffe pendant une année entière avant de subir sa première chirurgie en 1985. Elle a pleuré à l’hôpital quand elle a réalisé que sa vue était complètement rétablie. Après sa chirurgie, elle a commencé sa carrière en tant que comptable, a déménagé dans une petite ville, est tombée amoureuse et s’est mariée. Comme sa cornée ne pouvait pas se régénérer, sa vision est devenue trouble à nouveau, et au milieu des années 90, Kelly a reçu une greffe de cellules souches dans les deux yeux avant les greffes de cornée – cette fois, sans avoir à attendre. « [Les banques d’yeux et les organismes communautaires] ont fait un travail formidable de promotion du don de tissus cornéens; elles ont fait disparaître les listes d’attente à l’époque. Plusieurs personnes faisaient le choix de les céder aux autres à la fin de leur vie. C’est vraiment incroyable », affirme Kelly. Après ces chirurgies qui lui ont rendu la vue, elle s’est sentie suffisamment à l’aise pour fonder une famille.
Ce que Kelly trouve remarquable c’est que, autant ses yeux ont continué à se détériorer tout au long de sa vie, autant la science a également réussi à faire des progrès au point de mettre sur pied de nouveaux traitements pour elle. Kelly a dû subir plusieurs autres chirurgies, y compris la pose d’un dispositif unique qui agit comme une cornée artificielle. Un tissu cornéen donné était nécessaire pour fixer les dispositifs à ses yeux.
Au cours de sa vie, Kelly a reçu huit greffes de tissus cornéens (quatre dans chaque œil). Même si elle se réjouit de ce que son problème de santé n’était pas de nature à mettre sa vie en danger, Kelly aurait eu une vie très différente sans ses donneurs. « Perdre la vue après avoir vécu sa vie avec la vision… c’est difficile à accepter. Je sais que les gens choisissent de le faire tout le temps, mais je ne pense pas que j’aurais eu des enfants sans mes donneurs. Cela me brise le cœur de penser que je n’aurais peut-être pas eu ma fille », songe Kelly.
Le don de tissus ne reçoit souvent pas autant d’attention que le don d’organes, et Kelly voulait partager son histoire parce qu’elle voulait que les gens comprennent l’impact de ce don : « Les donneurs ne sauront jamais comment le don change la vie d’une personne… mais tout y est : la capacité de cuisiner, de lire, de voir le sourire de quelqu’un… c’est la confiance et l’autonomie. C’est un cadeau d’expériences qui n’auraient jamais été possibles autrement. »
Et Kelly savoure toujours chacune de ses nouvelles expériences. Elle est récemment partie en voyage pour explorer la Grèce avec sa fille et a apprécié chaque minute : « Je ne peux pas imaginer être plus reconnaissante pour quoi que ce soit d’autre dans ce monde. C’est bien plus que de la simple chance. C’est vraiment le résultat de la bienveillance totale et absolue de quelqu’un d’autre. »